Une histoire de 4000 ans
Mais comment la dune du Pilat s’est-elle formée ?
L’accumulation de sable s’est effectuée de façon discontinue au fil du temps, selon 5 phases durant les 4000 dernières années.
Des périodes caractérisées par un climat froid, sec et venteux ont entraîné le déplacement et l’accumulation du sable. Elles se sont alternées avec des périodes plus chaudes et humides, propices au développement de la végétation.
Les restes de végétation sont visibles de la plage au sommet de la dune, sous la forme de lignes noirâtres courant sur le flanc ouest de la dune.
On parle de paléosols. Il s’agit en fait de matière organique (troncs d’arbre, pommes de pins…) fossilisée, compressée par le sable. On peut y retrouver des vestiges archéologiques.
Pomme de pin fossilisée, vieille de -4000 ans
Le plateau landais s’étend à l’emplacement actuel de la dune du Pilat. Cette zone sans relief et marécageuse est recouverte alors principalement de pins sylvestres, de pins maritimes, de noisetiers, de bouleaux, d’aulnes et de chênes. La présence de ces espèces végétales témoignent d’un climat froid.
De nombreuses souches et restes de végétaux de cette lointaine époque sont encore visibles, et constituent le paléosol 1, qui affleure particulièrement bien du côté de la plage de la Corniche. Il repose sur l’alios (couche noire et compacte, résultant de la cimentation naturelle de sable, d’oxyde de fer et de matière organique).
Dépôt de squelettes de diatomées observable au dessus du paléosol 2
Le climat devient plus sec, les premiers sables côtiers entraînés par les vents d’ouest recouvrent la forêt et forment les premières dunes. A la fin de cette période, entre -2000 et -500 ans, une nouvelle végétation similaire à la précédente, colonise ce territoire, formant aujourd’hui le paléosol 2 (localisé entre 2 et 5m au-dessus de la plage). Au pied des dunes, se forme un étang d’eau douce, dont les traces apparaissent aujourd’hui sous forme de minces traînées gris-clair. Il s’agit de squelettes de diatomées (micro-algues).
Des sites archéologiques (datant de 900 à 600 ans avant JC) témoignent de la présence de l’homme dès cette époque et de la proximité du littoral. Un site d’exploitation de sel a même été retrouvé par les archéologues.
Accumulation de coquilles sur le paléosol 3 témoignant d’une consommation importante de mollusques par les habitants.
Le marais disparaît, enseveli sous de nouvelles dunes mesurant entre 20 et 40 m de haut. A la fin du Moyen-âge, le climat se radoucit et devient plus humide, la végétation se développe alors à nouveau. Ce niveau correspond au paléosol 3, daté du XVIe siècle. Ce sol épais seulement de quelques centimètres ondule à mi-hauteur sur la face ouest de l’actuelle dune du Pilat.
Ce paléosol est connu sous le nom de « sol à débris de cuisine » caractérisé par des amas de coquilles d’huîtres plates, de coques, de palourdes, de praires, de coquilles Saint-Jacques et de pétoncles. Des pièces de monnaie des XVI-XVIIe siècles et des céramiques ont également été retrouvées. Ces vestiges témoignent d’une phase prolongée de stabilité.
Fragments de pots de résine témoignant de l’activité de gemmage en cours au XIXe siècle.
Le climat change. Des vents puissants vont créer une nouvelle série de dunes, dites “dunes modernes”. Ces dernières ensevelissent, sous 50 à 60m de sable les anciennes dunes, mais aussi les villages et les cultures. On nomme cette nouvelle dune atteignant 100m de hauteur : la dune de la Grave.
Pour limiter l’avancée des dunes littorales, une campagne de semis de pins maritimes est menée sur l’ensemble du territoire des Landes.
Les hommes fixent les dunes alors par semis de pins maritimes en application d’un décret consulaire de 1801. Ces travaux sont supervisés par Nicolas Brémontier, Ingénieur des Ponts et Chaussées. La dune de la Grave est ainsi ensemencée au cours du XIXe siècle.
Le paléosol 4, le plus haut, daté du début du XIXe siècle correspond à sa surface. Une forêt cultivée de pins s’étend là à cette époque. De nombreux pots servant à la récolte de la résine y ont été retrouvés.
Vestiges arborés de la tentative de fixation du XIXe siècle de la dune du Pilat
Sous l’effet de l’érosion marine et de l’avancée du trait de côte vers les terres, la végétation recouvrant la dune disparaît vers 1860, et la dune de la Grave se remet en mouvement. Une nouvelle dune ensevelit la précédente : la dune du Pilat.
M. Clavel décrit ce phénomène dans un article datant de 1887 : “A l’est du banc d’Arguin, on assiste en ce moment à la formation d’une nouvelle dune qui engloutit sous le sable des forêts de pins hauts de 15m”.